Quand la politesse est un tic nerveux: Comment être poli sans être énervant.

L’excès de politesse, c’est-à-dire, l’usage excessif de formules de politesse apprises par coeur telles que “Bonjour Madame”, “Bonjour Monsieur”,”Excusez-moi”, “Je suis désolé”, “Merci”, “Je vous en prie”, et plein d’autres, généralement dites de façon systématique, plusieurs fois par la même personne au même moment, avec une voix souvent tendue et aigüe (quand c’est une femme), me fait plus penser à un toc ou à un tic nerveux qu’à la simple expression d’un sentiment de remerciement ou d’excuse qui devraient être agréable à entendre.

Pourquoi je vois ça comme ça ?

Simplement, parce que quand je ressens cette automatisation dans l’utilisation des formules de politesse dans la vie courante, je ressens une certaine tension due probablement à cette obligation de dire ces formules figées sans faire une adaptation spontanée à la situation et à la personne, de peur d’être mal interprétée.

Je vous raconte une situation absurde et une anecdote très courte mais très parlante.

La situation absurde est que, pendant des mois, une des portes de la seule sortie de la station du métro Parmentier (Ligne 3) restait tout le temps ouverte sans qu’on ait besoin de la toucher. Cependant, ceci n’empêchait pas les gens, en passant par là chaque jour, de tenir cette porte déjà ouverte en se retournant et attendant un “Merci” et je constatais qu’ils recevaient ce Merci. Comme si, même dans les situations où on n’a besoin de personne, on continuait à exiger et à utiliser ces codes de politesse. Franchement, ça m’a beaucoup amusée les premières fois, car ça m’a fait pensé à Jacques Tati. Mais c’est en vrai. Le top donc!

Parfois j’ai même l’impression que les gens se bousculent dans la rue pour se demander pardon, et, ainsi communiquer, entrer en contact avec l’autre même pendant la seconde que dure la bousculade. Je trouve ça maladroit mais aussi touchant quelque part.

Voici l’anecdote courte mais parlante: J’arrivais à la librairie Gibert Jeune à Saint Michel et en voyant un monsieur qui avait tous les gestes d’un vendeur, je me suis approchée de lui et je lui ai dit: “Bonjour” et, sans attendre son “Bonjour”, je lui ai posé une question concernant un bouquin. A peine je commence à formuler ma question, juste après mon “Bonjour”, il me regarde d’un air instituteur à deux balles, et me dit du petit doigt (comme s’il était programmé pour donner des petites leçons de base à tout moment): BONJOUUUURRR. Et moi, très vexée par son jugement injuste et sa leçon mal placée (car je lui avais dit “Bonjour” avant de poser la question), je lui ai répondu: “Je vous ai déjà dit Bonjour une fois, Combien de fois voulez-vous que je vous le dise ? Je ne vais pas vous dire 4 fois bonjour Bonjour, bonjour, bonjour. Ça va ? Maintenant vous pouvez me dire où se trouve ce livre ?” Et, sans changer l’expression de son visage, il m’a montré du même doigt l’endroit où je pouvais trouver ce livre. Pas de rancune mais quels cons ces petits donneurs de leçon !

A la boulangerie, on n’entend que: “Un ou une …., s’il vous plaît”. “Et avec ceciiiiiii ?” “Ce sera tout ?” “Merci madammmmme, Merci monsieuuuuuuuuuur”, “Bonne journée”, “Bonne journée à vous” et tout ça avec une voie extrêmement aigüe quand l’employé est une femme (comme c’est la plupart des cas).

Un jour, j’ai décidé de tester plusieurs façons naturelles d’exprimer les mêmes sentiments mais sans utiliser la formule apprise depuis toute petite par presque tous les Français. Et, selon la personne que j’avais en face, la réaction était différente. Toutes les vieilles dames que j’ai rencontré dans la rue ou supermarché, coincées et souvent chiante et malheureusement très nombreuses à Paris, trouvent qu’un simple sourire sincère et spontané pour dire “Merci” ne suffit pas du tout. C’est justement parce qu’elles attendent de moi tout un paquet de “Merci Merci Merci”, que je préfère les remercier avec un simple mais beau sourire.
De nombreuses jeunes femmes de 25-40 (j’ai 35 ans) se montrent un peu choquées par mon manque de formalité et le ressente comme una agression. Les hommes sont beaucoup plus détendus au sujet des formalités. Le sourire d’une femme plaît plus à un homme qu’à une autre femme. Moi, personnelllement, je suis sensible aux deux sourires, sans aucune distinction de genre.
Les adolescents et les préadolescents sont les meilleurs interlocuteurs pour ce genre de communication dépourvue de formalités alourdissantes. Un simple sourire est perçu comme un démonstration de complicité. Et ils ont tout compris: c’est exactement ce que je veux transmettre: une complicité spontanée et éphémère qui n’est pas sans importance dans la vie de tous les jours.

Conclusion: La politesse ça peut être bien mais n’en abusons pas! Restons naturels et légers dans les petits contacts de la vie courante!

9 commentaires pour “Quand la politesse est un tic nerveux: Comment être poli sans être énervant.”

  1. phil dit :

    bonjour,
    merci beaucoup pour cette note.
    de rien, au revoir, agréable journée !

  2. Lumadu dit :

    Je vous en prie, cher monsieur. Merci à vous-même de votre réaction.

    En fait, c’est l’expression du visage, le regard, la façon de le dire, le ton et le timbre de la voix qui sont souvent énervants et même parfois carrément insupportables.

    La politesse par écrit, donc muette et sans visage, passe mieux. Ceci dit, quand il faut rédiger une lettre de motivation dans le cadre de la recherche d’emploi, c’est hyper chiant car on sent qu’on doit se transformer en une sorte de petit robert de la politesse version 1789.

    L’expression finale “Je vous prie de croire, cher monsieur, en l’expression de mes sentiments les meilleurs” est pour moi une horreur qui ne veut plus rien dire car c’est une expression figée, qui ne sort pas du coeur.

    Ce sera tout, le petit monsieur
    Excellente soirée à vous, cher monsieur.

  3. verdié dit :

    vous n’ aurais pas par hazar importé un peu de la fameuse intolerence argentine? laisser les gens faire comme ils veulent,surtot dans leur pays! Argentino

  4. Lumadu dit :

    Salut Verdié:

    On est intolérent en Argentine? Mis à part l’affreuse dictature militaire qu’on a subit il y a un peu moins de trente ans, je ne connaissais pas ce défaut argentin, l’intolérence. Je croyais connaître tous les défauts mais pas celui-ci.
    Je vais réfléchir à ça.

    Oui, évidemment que je les laisse faire comment ils veulent mais ça ne m’empêche pas de donner mon impression sur certaines situations que je vis ici car, surtout au début, je me suis souvent senti aggréssé et mal à l’aise face à des formules de politesse dites souvent avec une tension désagréable et hargneuse. Ceci dit, c’est loin d’être la majorité des cas mais ce n’est pas non plus un cas isolé. Presque tous mes amis en France sont français et ils sont assez d’accord avec moi sur ce point. Eux-aussi ils sont dans leur pays et ça ne les empêche pas d’être d’accord avec moi sur certains points. Je respecte ton point de vue aussi. C’est ça la liberté d’expression: On peut tout dire si on laisse les autres tout dire à leur tour.

    Ma mère est française, je suis aussi française (et argentine) et je suis fière de toutes les qualités de sa culture qu’elle m’a transmise car ce sont deux cultures très complémentaires sur différents points.

  5. clément dit :

    Chère Lumaru,

    Je trouve ton article tres interressant puisqu’il serait le pile “parisien” de mon face “argentin”. De plus, l’écriture de mon article sur la politesse argentine est tres frais, et je comprend tout a fait ta reaction. Il est certain que pour toi, toutes ces expressions automatiques de politesses exacerbées te sont plus etrangères que pour nous, petits français stereotypés et “afrancesados” selon la denomination argentine. Certes, ce sont des codes vides de sens, sans interets preçis mais presents en France. Education & culture obligent, ne pas etre poli vous classe immediatement au rang des “mal-élevés”, des “rustres”, ou des….”etrangers”! Sans compter sur le moment opportun de placer sa formule de politesse. Dire “merci” doit etre vide de sens, au quotidien, rapide, induit mais obligatoire. Le vrai “merci”, dont tu juxtapose judicieusement par un sourire est le merci argentin, celui qui vient du coeur, rempli de sincerité et de verité. Pour exprimer celui ci, nous avons encore d’autres formules!! et oui!! du genre ” Ca me touche beaucoup”, ” merci infiniment”. Normal car le “merci” est tellement formalisé qu’il nous faut rajouter une couche pour exprimer la sincerité.
    Bonne continuation dans ton blog, que je suivrai avec interet d’orenavant!
    parole de Clément ;-)

  6. Lumadu dit :

    Je te fais un sourire, Clément, pour ton commentaire et ton soutien.

    Pour moi, le langage du corps est aussi -sinon un peu plus- important que le language des mots car le corps ne passe pas trop sur le filtre de l’intellectuel, ce qui lui permet souvent d’être plus sincère, plus authentique. Le sourire fait partie du language du corps et il me paraît très important quand on l’utilise sincèrement.

    Je trouve tes observations sur les comportements argentins de base très justes. Comme d’habitude, je continuerai de te lire avec curiosité et intérêt.

    Mon blog est tout nouveau, donc pour le moment un peu maigre et austère, j’apprends sur le tas, mais je suis très motivée pour développer ce moyen de communication.

  7. Alejandro dit :

    Desde Argentina te envío una enorme sonrisa (pues tenemos grandes odontólogos) y un ¡GRACIAS! (en mayúsculas) por no olvidarte de nosotros. Confío en que, como siempre, seguirás luchando por un mundo más transparente, menos acartonado…en fin, más sincero, más real. Aunque a veces tus denuncias deban enfrentar alguna que otra invectiva, estás en el camino correcto. ¡Adelante! Muchos Besos.
    PD: A los lectores franceses les pido disculpas por mi incapacidad para escribir en su maravilloso idioma. Lamentablemente, apenas soy capaz de leerlo.

  8. Drew dit :

    Drew…

    OMG! I cant beleive it….

  9. \')/* dit :

    ekibastos…

    ekibastos…

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